08/12/2011
Sénégal

Le gouvernement invité à mettre en place une autorité de régulation indépendante

La rapporteuse spéciale des Nations unies pour le droit à l'eau et à
l'assainissement, Catarina de Albuquerque, a invité le gouvernement
sénégalais à mettre en place une autorité de régulation indépendante
dans les domaines de l'eau et de l'assainissement afin de s'assurer du
niveau abordable du coût de ces services. "J'invite le gouvernement à
mettre en place une autorité de régulation indépendante avec pour
mission de surveiller les acteurs privés et/ou publics, de façon à
s'assurer que ces services essentiels pratiquent des coûts abordables en
garantissant la qualité et l'accessibilité pour tous et sans
discrimination"
, a-t-elle déclaré.

Madame de Albuquerque a indiqué que le Sénégal a l'opportunité de
renforcer son engagement en devenant le premier pays africain à ratifier
le protocole facultatif du Pacte international sur les droits
économique et socioculturels. "Le Sénégal a fait des progrès
considérables ces dernières années [dans le domaine du] droit à l'eau et
à l'assainissement. Mais, il y a encore un long chemin à parcourir pour
s'assurer que le droit à l'eau et à l'assainissement devienne une
réalité dans la vie des Sénégalais"
, a reconnu la rapporteuse
spéciale. Reconnaître l'eau et l'assainissement comme un droit oblige
l'État à définir une approche sociale afin de vendre l'eau à des prix
abordable aux populations ; "le prix de ces services doit être abordable même aux plus pauvres",
a indiqué Catarina de Albuquerque, rappelant que ces populations, qui
vivent dans les zones où il n'existe pas de connexion au réseau, payent
quatre fois plus pour l'eau achetée à la borne fontaine que celle qui
sont branchées et qui bénéficient des tarifs sociaux. De même, a-t-elle
ajouté, les communautés les plus pauvres, qui vivent en zones
périurbaines et qui dépendent de fosses septiques, payent souvent une
somme plus élevée pour la vidange, comparées à celles qui sont servies
par un système collectif d'assainissement. "Dans quelques maisons que
j'ai visitées, les familles ont été obligées de consacrer environ 20 %
de leurs revenus mensuels pour payer les services d'eau et
d'assainissement, tandis que le pourcentage recommandé par la Banque
mondiale est de 3 à 4 %"
, a-t-elle expliqué. La rapporteuse a à ce sujet relevé la défaillance de l’État. "Le
gouvernement du Sénégal a affirmé à plusieurs reprises que
l'assainissement est une priorité. Cependant, cela n'a pas été traduit
en termes d'allocations budgétaires suffisantes"
, a dit l'experte indépendante. "Sans
une enveloppe budgétaire suffisante et constante consacrée à ce
secteur, un pourcentage significatif des Sénégalais restera condamné à
des conditions malsaines de vie, les privant ainsi de la jouissance de
plusieurs droits fondamentaux."
Toutefois, selon Mme de Albuquerque, "des
meilleures conditions d'assainissement ne seront pas atteintes
simplement par la construction de latrines et de fosses septiques."

De son point de vue, de véritables changements dans les conditions
d'hygiène ne sont possibles que si la population est pleinement
sensibilisée au sujet des pratiques d'hygiène améliorées.

"Les futures réformes du secteur et la révision du cadre légal du
secteur doivent en priorité corriger ces inégalités aussi bien que les
disparités constatées entre les différentes localités"
, a suggéré la
rapporteuse. En ce sens, il s'avère indispensable de prévoir des
mesures visant à identifier les populations pauvres, ainsi qu'à éliminer
toutes les barrières financières et administratives qui rendent l'accès
à l'eau et à l'assainissement inabordables. Par ailleurs, le cadre
juridique des droits de l'homme n'impose pas une forme particulière
d'approvisionnement public ou privé, a-t-elle cependant relevé. "Ce
qui est fondamental est que, quelle que soit la formule retenue, la
décision de l'État de déléguer ou non la fourniture de ces services doit
être prise de façon démocratique et participative"
, a-t-elle
estimé. Ainsi, tous les instruments de délégation y compris les
contrats, doivent être conformes aux normes relatives au droit de
l'homme, contribuer à la réalisation du droit à l'eau et à
l'assainissement et guider les activités des prestataires de service.

Durant son séjour au Sénégal, du 14 au 21 novembre, Mme de Albuquerque a
rencontré des représentants du gouvernement, des ministères, les
partenaires techniques et financiers, les agences du système des Nations
Unies et des représentants du secteur privé et de la société civile.
Elle a également visité des communautés à Dakar, Guedyawaye, Rufisque et
Kaolack. La Rapporteuse spéciale présentera son rapport de mission au
Conseil de droits de l'homme en 2012.

Agence de Presse Sénégalaise (Dakar) – AllAfrica 21-11-2011
Nations unies (New York) – AllAfrica 21-11-2011