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La ville réduite

 

Chef de bande inspiré, converti et baptisé, Clovis choisit Paris pour capitale du royaume des Francs. Inscrite dans le périmètre étroit de l'enceinte (à peine 8 hectares), elle rassemble environ 2 000 habitants dans un lacis de ruelles étroites. L'eau ne pose pas problème, elle entoure la ville, disponible et claire. Hors les murs, s'édifient églises et abbayes, comme celle de Saint-Germain-des-Prés, fondée par Childebert, fils de Clovis. Nous ne savons que peu de choses de l'habitat mérovingien, dont il reste peu de traces, comme de l'habitat carolingien.

Les dernières invasions viennent du nord ; fin 856, Paris est désertée et sa population réfugiée dans les monastères ou les forêts alentours. La ville est occupée par les Normands, qui la pillent, ainsi que les abbayes de Saint-Germain et de Sainte-Geneviève. Ils repartent, leurs barques chargées à ras bord. Cette fois, on songe à fortifier l'île plus efficacement, garnissant les vieux remparts de lourdes tours de bois. Elles permettront aux Parisiens de résister au siège des 700 barques normandes du chef Siegfrid ; un siège qui devait durer plus d'un an, avec des épisodes dramatiques où la cité fut à deux doigts d'être investie. La rive gauche est alors dévastée, les édifices romains en ruine, églises et monastères brûlés. La paix reviendra avec Hugues Capet, Paris récupérant son statut de capitale. La mémoire des invasions reste, et la jeune capitale du royaume capétien sera, jusqu'au milieu du XVIIème siècle, une ville fermée, dont les enceintes successives marqueront le développement.
 

Aux temps médiévaux

La "panique" de l'an 1000 est une idée fausse, une légende. Le moine Glaber nous décrit une floraison d'églises neuves. Avec les abbayes, les environs de l'île s'en couvrent, comme les satellites d'une planète : au sud, Saint-Germain-des-Prés est reconstruite et solidement fortifiée, au nord, s'édifie Saint-Martin-des-Champs. Pourvues de larges étendues de terres cultivables, ces établissement religieux attirent une population qui, en se fixant, donnera naissance à de multiples bourgs, lesquels deviendront plus tard des faubourgs. La rive gauche devient un pôle intellectuel et religieux ; la rive droite un pôle commercial et artisanal, à partir du premier port naturel, sur la Grève. La deuxième enceinte est construite par Philippe-Auguste : haute de 9 mètres, longue de 5 kilomètres, elle est flanquée de 70 tours en dur. C'est également sous son règne qu'apparaîtra la première fontaine publique, en 1182. L'eau n'est pas encore un vrai problème, et les diverses méthodes d'alimentation y pourvoient. Pour leurs besoins, trois grandes abbayes, Saint-Lazare, Saint-Martin et Le Temple, captent les sources des collines de Ménilmontant, Belleville et du Pré-Saint-Gervais, édifiant, vers 1220, deux petits aqueducs avec regards. En 1364, la Ville rachète aux moines de Saint-Lazare le petit aqueduc du Pré-Saint-Gervais pour alimenter la fontaine des Halles, puis celle des Innocents. La corporation des porteurs d'eau apparaît officiellement en 1292 : on en compte 58. S'ils desservent quelques particuliers, leur principale clientèle est celle des étuves, qui se multiplient. Ce sont des établissements de bains chauds, pris dans des ballonges ou cuveaux, c'est-à-dire de grandes baignoires de bois. Contrairement à une idée reçue, l'hygiène corporelle est réelle ; on aime à se baigner, se laver et se parfumer. Chaque maison ou presque possède son puits, à découvert ou à couvert, dans la cave. La voierie, placée sous la responsabilité du prévôt des marchands, est en revanche inexistante, il n'existe encore aucun réseau, autre que naturel, d'évacuation des eaux sales. Progressivement l'eau des puits ne tardera pas à être polluée. Mais on la boit sans crainte.
 

La troisième enceinte est l'œuvre de Charles V, après 1367. Son extension ne concerne que la rive droite, des guichets du Carrousel à la Bastille, en passant par la porte Saint-Denis. Les maisons sont basses, serrées, les rues étroites, mais la densité est faible ; il existe de nombreux espaces, les clos, cultivés ou bien utilisés en jardins-potagers. La fin du Moyen-Âge, du XIVème au XVème siècle, est sombre : famines, épidémies de peste. En 1348, les cimetières ne suffisent plus pour recevoir les dépouilles des victimes. La Guerre de Cents Ans, et la terrible querelle des Armagnacs et des Bourguignons assombrissent un peu plus le tableau, mais, si le pain est rare, l'eau ne fit jamais défaut.