ALTERNATIVE FLUVIALE
Les papiers parisiens prennent la Seine

Martine LE BEC

H2o – octobre 2008

 

Paris, le 19 septembre 2008 – Près 500 personnes étaient conviées au Port autonome de Gennevillers, dans l'ouest parisien, pour assister au débarquement de bobines de papier recyclé. Les bobines venaient de la papeterie UPM de Chapelle Darblay, à Rouen, et devaient rejoindre l'un des gros imprimeurs de la région parisienne.

Par la Seine, le trajet représente 210 kilomètres et prend 16 heures.

L'industriel de la papeterie, UPM, a initié le transport fluvial début 2005 en partenariat avec  le Syncicat intercommunal de traitement des ordures ménagères de l'Agglomération parisienne – SYCTOM,  et grâce à l'engagement des organismes publics concernés : Port autonome de Paris, Port de Rouen Vallée-de-Seine, Voies navigables de France, Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie... Il s'agissait alors d'utiliser la Seine pour transférer vers déchets papiers de l'Agglomération de Paris vers la papeterie de Chapelle Darblay. Depuis, les capacités de transport et portuaires ont été aménagées et développées pour englober cette année le transfert de papier neuf. Combinant le transport des matières premières à recycler et des bobines de papier, la voie fluviale dessert aujourd'hui 113 000 tonnes par an, l'équivalent de 4 500 poids lourds évités chaque année sur l'A 13, représentant une économie de 40 % la consommation d'énergie fossile, et autant d'émissions de CO2 en moins.

À l'aller, une barge chargée de caisses mobiles d'un nouveau type transporte les papiers à recycler provenant des centres de tri du SYCTOM de l'Agglomération parisienne vers la papeterie d'UPM-Chapelle Darblay à Rouen. Au retour, les bobines de papier neuf sont chargées sur la barge pour revenir vers Paris et être utilisées par les imprimeries franciliennes.

1 500 tonnes de papier sont ainsi transportées par semaine : 750 tonnes à l'aller, sous forme de balles de journaux et magazines ; 750 tonnes au retour, sous forme de papier neuf en bobines.

Un automoteur fluvial de type Ro-Ro (roll-on-roll-off, "qui roule pour entrer et pour sortir") est à l'étude ; ce bateau transporterait 60 caisses mobiles autoportantes, soit 160 000 tonnes, ce qui remplacerait 6 600 rotations routières par an sur l'autoroute A13.

Le trafic fluvial de conteneurs en Île-de-France a été multiplié par 10 en 10 ans pour représenter aujourd'hui près de  22 millions de tonnes. En 2007,  le Port autonome de Paris, la Région Île-de-France et l’ADEME ont mené une étude sur les impacts comparés en matière de développement durable entre le mode fluvial et la route à partir de l’évaluation de chaînes logistiques existantes chez Monoprix et Lafarge empruntant la Seine, l’une pour  le transport de conteneurs, l’autre pour celui de granulats. L’objet de l’étude, outre l’évaluation comparée des chaînes logistiques  existantes versus un 100 % route,  théorique, était aussi d’identifier les conditions de "bascule" de la route au fluvial afin de guider les décideurs dans les mesures à envisager pour favoriser l’absorption par le fluvial des flux croissants de marchandises à destination de Paris et l’Ile-de-France. La conclusion de l'étude est sans appel : la route consomme (carburant) et émet (gaz à effet de serre) environ 2,5 fois plus que le fluvial. Un outil de modélisation, l’éco-comparateur, a été développé à partir de l'étude, selon lequel le trafic fluvial de conteneurs en Île-de-France a permis en 2007 d’économiser 12 500 tonnes de CO2. .