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Gérard BORVONC'est un examen approfondi de cette triste situation récurrente que nous propose Gérard Borvon, militant écologiste de longue date.

S-EAU-S

C'est un examen approfondi de cette triste situation récurrente que nous propose Gérard Borvon dans son récent livre "S-EAU-S". Militant écologiste de longue date, l'auteur s'implique dans de nombreuses actions menées en Bretagne sur les thématiques de la qualité et du prix de l'eau. Il est notamment président de l'association qui porte le nom de son ouvrage.

L'analyse des pollutions des milieux aquatiques est très documentée et présente les causes, les responsabilités et les conséquences de ce déplorable état de fait. Le style journalistique et militant est agréable et tranche avec les rassurants discours institutionnels avancés sur la question. L'ouvrage a été écrit pour aider le grand public à prendre conscience du problème et faire en sorte que cette désastreuse expérience bretonne soit utile à tous.

Le mal présente de multiples origines...

Nitrates, métaux lourds, pesticides, algues vertes... Ces contaminants ou polluants demeurent endémiquement au rouge. Pour prendre l'exemple de la pollution par les nitrates, il est clair que la politique agricole en matière d'élevage porcin est insoutenable : près de 8 millions de porcs en Bretagne (5 porcs pour 1 Breton), l'équivalent d'une agglomération de 24 millions d'habitants sans station d'épuration !

... et de multiples facettes

Les conséquences de ces différents types de pollutions dont les effets se potentialisent, se font sentir dans les champs du sanitaire, de l'environnement et du social. Le responsable de cette dégradation de la qualité de l'eau est clairement désigné : le modèle productiviste agro-industriel breton. Un vocable qui regroupe pêle-mêle les lobbies du porc et ceux des légumes, regroupés en grosses coopératives et relayés par un syndicalisme corporatiste, les industriels de l'aliment, les abattoirs, les fabricants de matériel, mais bien évidemment aussi des élus, des banques.

Quant à la gestion de la politique de l'eau par l'Etat, le bilan apparaît contrasté. Par exemple, l'absence de résultats tangibles en matière de réduction des pollutions en regard des quelque 14 milliards de francs investis dans le PMPOA – Programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole – ou encore la faiblesse de la police de l'eau et les effets pervers du principe pollueur-encaisseur de subventions par les Agences de l'eau…

Le coût des factures d'eau ne cesse quant à lui de croître : + 60 % depuis 1992. Durant les six dernières années, les taxes ont représenté 44 % de l'augmentation du prix de l'eau, la redevance pollution prélevée par les agences de l'eau étant elle dans le même temps passée du simple au double. Depuis plus de vingt ans, le paradoxe breton est ainsi facile à résumer : la qualité de l'eau baisse quand les prix s'envolent. A qui profite les pollutions de l'eau ? Avant tout aux grandes compagnies de traitement de l'eau dont la mise en œuvre de solutions techniques dépolluantes comporte un message à l'effet pervers manifeste : "Continuons à polluer en amont puisque nous avons les moyens de dépolluer en aval !".

S-EAU-S présente toutefois une lacune importante. Au-delà des constatations bien étayées et d'une analyse réaliste du problème des pollutions de l'eau, il n'examine pas la question pragmatique que se pose tout un chacun : "Quelle eau boire au quotidien ?". Certes, nous partageons profondément la conviction de l'auteur sur le fait que le seul combat qui vaille est celui qui vise à recouvrir une eau de qualité en amont. Philosophie positive pour les futures générations mais en l'état actuel des choses, tout le monde s'accorde à reconnaître que cette lutte de reconquête d'une eau de qualité en Bretagne est une œuvre de longue haleine. La méfiance des consommateurs concernant la potabilité de l'eau du robinet est légitime. Elle se traduit par l'explosion de la consommation des eaux embouteillées ou par le choix de systèmes de filtration domestique. Quelle eau consommer sachant qu'il n'existe pas de solution miracle ? Cette question mérite à elle seule un livre mais on aurait aimer trouver dans S-EAU-S des pistes de réflexion sur ce sujet important pour notre santé.