Les années 1960 sont toujours présentées comme déterminantes pour cette évolution car c'est alors qu'un puissant lobby scientifique, industriel et financier a pu imposer ses normes sur cet espace encore largement gratuit. Cette période est donc riche en transformations et ruptures :
En France, ces nouvelles orientations apparaissent dans les travaux de la Commission Eau du 4ème plan. Cette équipe, composée d'une soixantaine d'ingénieurs et d'administrateurs civils formule des propositions qui marquent une rupture fondamentale dans l'histoire de l'hydraulique française. Reprenant l'approche Pigouvienne, sous couvert de lutte antipollution, ils donnent une valeur monétaire à tous les usages des eaux courantes, et instaurent un nouvel échelon de décision indépendant des échelons traditionnels : les agences financières de bassin.
Pourtant, une mise en perspective historique montre que les transformations des années 1960 ne sont que l'aboutissement d'un long processus d'intégration au marché. En effet, à cette date, les eaux courantes sont déjà structurées en filières d'usages (hydraulique agricole, assainissement et eau potable, eau à usage industriel, hydroélectricité), dont certaines sont dominées par des groupes industriels (distribution-assainissement, travaux publics, fabricants de tuyaux) ; toutes fonctionnent déjà selon des dispositifs législatifs, institutionnels ou idéologiques qui leur permettront d'intégrer facilement le marché.
Il nous semble donc indispensable de remonter dans le temps pour trouver les racines de cette marchandisation.