Il faut purifier huit tonnes et demie de roche pour produire un kilo de vanadium, seize tonnes pour un kilo de cérium, cinquante tonnes pour l'équivalent en gallium, et le chiffre ahurissant de mille deux cents tonnes pour un malheureux kilo d'un métal encore plus rare, le lutécium. Le résultat, c'est en quelque sorte le "principe actif" de l'écorce terrestre : un concentré d'atomes aux propriétés inouïes, ce que des milliards d'années d'activité géologique peuvent nous offrir de mieux. Une infime dose de ces métaux, une fois industrialisée, émet un champ magnétique qui permettra de produire davantage d'énergie pour la même quantité de charbon ou de pétrole. C'est là la clé du "capitalisme vert" : nous remplaçons des ressources qui rejettent des milliards de tonnes de gaz carbonique par d'autres qui ne brûlent pas – et ne génèrent donc pas le moindre gramme de CO2.
Titre | La guerre des métaux rares La face cachée de la transition énergétique et numérique |
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Auteur | Guillaume Pitron |
Éditeur | Les Liens qui Libèrent |
ISBN | 979-10-209-0574-1 |
Pages | 296 |
Sortie | janvier 2018 |
Il faut purifier huit tonnes et demie de roche pour produire un kilo de vanadium, seize tonnes pour un kilo de cérium, cinquante tonnes pour l'équivalent en gallium, et le chiffre ahurissant de mille deux cents tonnes pour un malheureux kilo d'un métal encore plus rare, le lutécium. Le résultat, c'est en quelque sorte le "principe actif" de l'écorce terrestre : un concentré d'atomes aux propriétés inouïes, ce que des milliards d'années d'activité géologique peuvent nous offrir de mieux. Une infime dose de ces métaux, une fois industrialisée, émet un champ magnétique qui permettra de produire davantage d'énergie pour la même quantité de charbon ou de pétrole. C'est là la clé du "capitalisme vert" : nous remplaçons des ressources qui rejettent des milliards de tonnes de gaz carbonique par d'autres qui ne brûlent pas – et ne génèrent donc pas le moindre gramme de CO2.
Moins de pollution, mais beaucoup plus d'énergie dans le même temps. Ce n'est dès lors pas un hasard si l'un de ces éléments fut baptisé prométhium à sa découverte par le chimiste Charles Coryell dans les années 1940.
[L'acte de Prométhée était rempli d'audace et il vaudra à son auteur un châtiment à la hauteur : celui d'être attaché à un rocher sur le mont Caucase, son foie dévoré parun aigle chaque jour, et repoussant la nuit.]
Transition énergétique, révolution numérique, mutation écologique... Politiques, médias, industriels nous promettent en chœur un nouveau monde affranchi du pétrole, des pollutions, des pénuries et des tensions militaires. Cet ouvrage, fruit de six années d'enquête dans une douzaine de pays, nous montre qu'il n'en est rien.
En nous émancipant des énergies fossiles, nous sombrons en réalité dans une nouvelle dépendance : celle aux métaux rares. Graphite, cobalt, indium, platinoïdes, tungstène, terres rares… ces ressources sont devenues indispensables à notre nouvelle société écologique (voitures électriques, éoliennes, panneaux solaires) et numérique (elles se nichent dans nos smartphones, nos ordinateurs, tablettes et autre objets connectés de notre quotidien). Or les coûts environnementaux, économiques et géopolitiques de cette dépendance pourraient se révéler encore plus dramatiques que ceux qui nous lient au pétrole.
Dès lors, c’est une contre-histoire de la transition énergétique que ce livre raconte – le récit clandestin d’une odyssée technologique qui a tant promis, et les coulisses d’une quête généreuse, ambitieuse, qui a jusqu’à maintenant charrié des périls aussi colossaux que ceux qu’elle s’était donné pour mission de résoudre.
L'auteur – Journaliste pour Le Monde Diplomatique, Géo ou National Geographic, lauréat de l’édition 2017 du prix Erik Izraelewicz de l’enquête économique créé par Le Monde et du prix Turgot du meilleur livre d'économie financière de l'année 2018, Guillaume Pitron a axé son travail sur la géopolitique des matières premières. Il intervient régulièrement auprès du parlement français et de la Commission européenne sur le sujet des métaux rares.
Son présent ouvrage a été le support d'un film documentaire : La Face cachée des énergies vertes, coréalisé avec Jean-Louis Pérez en 2020.