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Éric GAUME
auteur de "Éléments d'analyse sur les crues éclair" – Thèse ENGREF Paris
H2o – septembre 2002
La crue des cadereaux de Nîmes le 3 octobre 1988, qui avait à l'époque ravagé le centre ville et provoqué le décès de 9 personnes et plus de 4 milliards de francs de dégats matériels, est l'un des éléments qui ont motivé le présent travail de recherche. Signe d'un état des connaissances limité sur ce type de phénomènes naturels, cet événement avait surpris non seulement l'opinion publique mais aussi les spécialistes hydrologues qui ont été chargés de l'analyser. Comment était-il possible que ces cadereaux, cours d'eau méditerranéens à sec en été, dont le bassin versant total ne couvre pas plus de 50 km2 aient pu produire une crue dont le débit de pointe a été estimé à environ 1000 m3/seconde soit plus que le débit moyen du Rhône à l'étiage ?
Cette valeur place l'épisode nîmois parmis les plus fortes crues observées dans le monde sur des bassins de surface équivalente. Les qualificatifs employés à l'époque par la presse - déluge, apocalypse - traduisent d'ailleurs tout autant la démesure que la rareté supposée d'un tel événement. Et pourtant... cette crue ne semble pas inédite : l'exploitation des archives communales fait apparaître que la ville a été inondée partiellement ou totalement à 40 reprises au moins depuis le 14ème siècle. De plus, deux événements se rapprochent par les cumuls pluviométriques mesurés de l'épisode de 1988 au cours des deux derniers siècles.
Les crues éclair (i.e. crues soudaines provoquées par des événements pluvieux orageux) constituent sans aucun doute le risque naturel le plus destructeur en France. Malgré la menace qu'elles représentent et les nombreuses questions qu'elles suscitent, elles n'ont pas fait l'objet par le passé d'études systématiques. L'état des connaissances est actuellement loin d'être à la hauteur des enjeux exposés à ces crues et des ambitions désormais affichées par les pouvoirs publics en matière de prévention.
Dans la première partie de la thèse sur les crues éclair, une méthodologie d'analyse hydrologique post-événementielle a été mise au point et testée sur cinq études de cas. Outre l'exploitation classique des données pluviographiques et radar et l'estimation des débits de pointes de crues à partir des niveaux d'eau atteints, les informations concernant l'évolution temporelle des hauteurs d'eau et des débits correspondants ont été collectées auprès des témoins oculaires. Les premiers résultats obtenus sont encourageants et relativement inattendus : 1) les bassins versants réagissent avec retard aux épisodes de pluies intenses, 2) les volumes d'eau de pluie retenus sur les bassins, ne participant pas à la crue, sont importants (de 150 à 200 millimètres dans les études de cas traitées), 3) le type d'occupation des sols ne semble pas jouer un rôle déterminant sur la réponse hydrologique des bassins versants.
La seconde partie de la thèse est consacrée à l'analyse théorique des lois de probabilité des débits de pointes de crues. les possibilités offertes par l'approche qualifiée de semi-déterministe, consistant à coupler un modèle mathématique de genèse aléatoire de séries pluviographiques et un modèle "pluie-débit sont explorées. Il apparaît que, compte tenu des propriétés de la relation pluie-débit, les distributions des débits pointes de crues (DDPC) n'appartiennent probablement à aucun des trois types de lois des valeurs extrêmes.
Elles sont asymptotiquement contrôlées par la distribution des intensités moyennes maximales des événements pluvieux, mesurées sur une durée caractéristique du bassin versant. La forme des DDPC dans la gamme des périodes de retour intermédiaires - typiquement 10 à 10 6 ans - dépend du modèle "pluie-débit" utilisé. Certaines hypopthéses, réalistes au regard des retours d'expériences, conduisent à des distributions "multi-modales", dont le gradient local très élevé sur papier de Gumbel peut largement dépasser le "Gradex" des pluies sur une plage limitée de périodes de retour. .