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Prague, jeudi 12 août 2002 – Le cœur de la Vieille-Ville est désert, uniquement sillonné par les patrouilles de police et les pompiers. Il a été entièrement évacué au cours de la matinée de mercredi. Toutes les portes et les fenêtres basses ont été protégées par des sacs de plastique remplis de sable. De nombreux autres quartiers de la capitale étaient déjà sous les eaux. Dans le quartier de Karlin plusieurs bâtiments se sont effondrés. Près de 50 000 personnes ont dû être évacuées dans la capitale à cause de la montée historique de la rivière Vltava. Prague, victime de la plus grave inondation qu'elle ait connue depuis 1890, a retenu son souffle. Le matin, le débit de la Vltava était de quelque 5 000 m3/seconde, plus de trente fois le chiffre habituel. Le barrage de secours, érigé au point le plus bas à côté du pont Charles pour protéger la Vieille-Ville, était le dernier rempart face à la montée des eaux. Renforcé par une centaine de sac de sable, les eaux étaient à quelques dizaines de centimètres du bord. Dans l'après-midi, les secouristes ont repris espoir : les hydrologues ont annoncé que le débit se stabilisait et ne devrait plus augmenter.
La crue centennale est devenue une attraction. Le pont Stefanikov s'est transformé en l'un des lieux touristiques les plus recherchés de la ville. Une foule cosmopolite s'y bouscule pour prendre quelques photos afin d'immortaliser la crue. Depuis la réouverture de la place de la Vieille-Ville le vendredi, on tombe à nouveau sur une foule des touristes. Elle grossit à mesure qu'on approche de la place Venceslas, les Champs-Élysées praguois. Là, rien ne laisse deviner la catastrophe toute proche, qui a fait neuf morts dans le pays.
Les Tchèques vont désormais découvrir l'ampleur des dégâts. Ils seront considérables : plus de 3 milliards d'euros, soit l'équivalent de plus de 5 % du PNB, selon l'évaluation de EIU (Unité d'intelligence économique à Londres). Beaucoup des pays européens ont envoyé une aide matériel tandis que l'Union européenne, de son côté, a débloqué, dans un premier temps, une somme de 58 millions d'euros principalement des fonds PHARE et ISPA. Un crédit à taux préférentiel de 200 millions d'euros devrait par la suite constituer une aide précieuse à la reconstruction.
Les usines des produits chimiques sur les rives de la rivière Elbe ont connu des sérieux problèmes pendant les inondations. Dans le meilleur cas, le dommage s'est limité à l'arrêt de la production. D'autres usines, comme celles de Lovechimie et de Spolana d'Unipetrol, ont en revanche enregistré des dégâts matériels. Les produits chimiques n'ont pas toujours pu être évacués à temps et se sont échappés dans l'atmosphère ou ont pollué la rivière. À Neratovice (à 15 kilomètres au nord de Prague), une alerte chimique a été déclenchée après une fuite de chlore à l'usine Spolana inondée, suscitant aussi une nouvelle inquiétude pour les stocks de dioxine et de mercure qui s'y trouvaient. Déjà en janvier, Greenpeace avait alerté les pouvoirs publics sur la situation précaire de ces stocks.
Au moment où la décrue de la Vltava était amorcée, le danger s'est déplacé sur l'Elbe (Labe) en Bohême du Nord, près de la frontière allemande. Les artificiers ont dû faire sauter deux péniches folles emportées par les flots. La navigation sur Elbe sera sérieusement entravée dans les mois à venir. Des péniches ont coulées ou été coulées pour éviter les eventuels dommages en cas de dérive. Beaucoup de chemins d'accès aux écluses ainsi que les signalisations ont été endommagés ou détruits par le passage des hautes eaux. Qui plus est, la crue a fait déplacer des quantités phénoménales de sédiments en modifiant complètement le chenal de navigation.
Outre les dégâts directs occasionnés, les inondations ont également engendré l'interruption des services, non seulement dans les endroits physiquement inondés, mais aussi dans leurs environs. Il s'agit principalement de l'électricité. Une centaine de relais et transformateurs ont dû être coupés pour éviter les risques de courts-circuits. Il en est résulté d'importantes perturbaations dans les télécommunications. Beaucoup de relais ont dû être arrêtés à défaut de disposer d'un nombre suffisant de groupes électrogènes. Le réseau fixe a été le plus touché avec plusieurs dizaines de milliers d'abonnés coupés. La multitude des opérateurs mobiles a cependant permis de conserver un taux de réception satisfaisant malgré une forte augmentation du nombre d'appels.
Les gens ont pu regagner leurs maisons après la décrue, mais seulement après l'inspection des bâtiments par les architectes, le rétablissement de l'accès à l'électricité et à l'eau et le passage obligatoire des services d'hygiène. Il a souvent fallu faire preuve de beaucoup de patience.
À l'exception de la ville de Trebon, les villes de Bohême de Sud n'ont pas connu de problèmes d'approvisionnement en eau potable. Les dégâts se sont fait sentir surtout dans les petites communes où les puits ont été inondés. Les habitants ont dû être approvisionnés par camions citernes pendant la durée des inondations. Grâce aux importantes réserves de Zelivka et Karana, les Praguois ne se sont même pas rendus compte que l'usine d'eau potable, située à Podoli au bord de Vltava, avait été mise hors service. Aucun manque en eau potable n'a été enregistré, même dans les zones les plus touchées, où de l'eau embouteillée a pu être distribuée.
S'agissant d'un système pressurisé, qui empêche l'intrusion des pollutions chimiques et/ou la contamination bactériologique, la qualité de l'eau potable ne devrait pas en principe pas souffrir des inondations. Par mesure de prévention le taux de chlore a néanmoins été augmenté. Si l'eau souillée pénètre le système, comme cela a été le cas dans les petites communes en Bohême de Sud, la distribution est suspendue, le réseau rincé et désinfecté avant reprise du service. Le travail de nettoyage et de curage est plus important au niveau du réseau des eaux usées. Selon un communiqué de Vivendi la remise à niveau du réseau praguois pourra prendre plusieurs semaines. Des problèmes peuvent également se poser après la baisse des eaux. Le séchage des sous-sols peut provoquer des mouvements du terrain et entraîner des ruptures dans les conduites, surtout aux endroits disposant d'une géologie complexe comme c'est le cas à Prague.
Selon le porte-parole du ministre tchèque de l'Intérieur Gabriela Bártíková, 220 000 personnes ont dû être évacuées dans l'ensemble de la République tchèque durant la semaine des inondations. Plus de 2 000 personnes ont été sauvées de la noyade.
Solidarité est peut-être le mot clé qui a fait que le nombre de victimes ainsi que les dommages sont restés minimes. Dans tous les endroits atteints, la population a pu participer aux travaux de protection, de nettoyage ou de reconstruction. Le nombre des personnes s'étant portées volontaires a d'ailleurs largement dépassé la demande. Beaucoup de personnes ne pouvant participer activement aux opérations ont pu aider en proposant du soutien matériel. "Si au départ c'est surtout de la nourriture et des vêtements qui ont été requis ; nous avons ultérieurement surtout eu besoin de gants, de pelles, de balais et surtout de désinfectants", explique le porte-parole du magistrat de Prague. Aussi bien au niveau local qu'au niveau national les écoles, transformées en centres d'accueil, ont permis de gérer au mieux l'afflux de l'aide et des marchandises à distribuer. Le système de mobilisation maintenue pendant l'ère communiste et l'esprit d'autodiscipline et de solidarité ont probablement facilité l'évacuation des habitants, leur hébergement temporaire et leur retour. De nombreux numéros de téléphone ainsi qu'une dizaine de sites internet ont été mis à la disposition de citoyens voulant s'informer sur la situation, tandis que les émissions de la radio et de la télévision nationale ont permis une information en quasi continu sur les inondations.
Au moment où la décrue de la Vltava était amorcée, le danger s'est déplacé sur l'Elbe (Labe) en Bohême du Nord, près de la frontière allemande. Les artificiers ont dû faire sauter deux péniches folles emportées par les flots. La navigation sur Elbe sera sérieusement entravée dans les mois à venir. Des péniches ont coulées ou été coulées pour éviter les eventuels dommages en cas de dérive. Beaucoup de chemins d'accès aux écluses ainsi que les signalisations ont été endommagés ou détruits par le passage des hautes eaux. Qui plus est, la crue a fait déplacer des quantités phénoménales de sédiments en modifiant complètement le chenal de navigation.
Après plusieurs jours consécutifs de précipitations d'une dizaine de millimètres et en raison de l'engorgement des sols, les eaux de pluie se sont mises à ruisseler. La quantité de pluie tombée a rapidement dépasser la capacité de stockage. Au moment des inondations le débit en travers de la cascade des barrages était réglé à 1 500 m3/seconde ; ce qui devrait correspondre, selon les calculs du gestionnaire au troisième niveau d'inondation et submerger en principe la vielle ville de Prague. Mais les calculs comportent en réalité plus de 30 % d'erreur et les niveaux estimés n'ont jamais été vérifiés sur le terrain. Pour l'heure, les débits de plus de 1 000 m3/seconde ne peuvent être précisément mesurés au-delà de simples estimations. Une meilleure régulation du débit aurait pu permettre d'optimiser la capacité de stockage en amont et ainsi permettre de diminuer la hauteur de crue à Prague. .
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