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Batailles pour une gestion publique de l'eau

Les 9 et 10 décembre se tiendront à Paris, au Pavillon de l’Eau, les Assises régionales des associations pour l’eau. L’occasion de revenir sur les batailles engagées en Île-de-France pour un retour en régie directe des services de l’eau.

Martine LE BEC

images extraites du film Eaux troubles Est-Ensemble-Veolia H2o – décembre 2011

 

Paris, le 24 juin 2010, Le Syndicat des Eaux d'Île-de-France – SEDIF, annonçait l’attribution à Veolia Eau du contrat de délégation de son service public de production et de distribution d'eau potable pour une durée de douze ans. Dans le nouveau périmètre d'activités défini, la délégation, qui a pris effet au 1er janvier 2011, représente un chiffre d'affaires cumulé d'environ 3 milliards d'euros. Le SEDIF est le premier service d'eau potable en France et l'un des premiers dans le monde par les volumes distribués et la population desservie : 750 000 mètres cubes d’eau distribués chaque jour à plus de 4,3 millions d'habitants répartis sur 144 communes de la région parisienne. Le 30 novembre 2010, la Communauté d'agglomération Est Ensemble – CAEE, regroupant 9 communes de Seine-Saint-Denis, au nord-est de la capitale, et totalisant 400 000 habitants, décidait elle-même d’adhérer au SEDIF.

Pour les militants du retour de l’eau en régie directe le coup a été dur, et surtout pour la Coordination Eau Île-de-France, qui compte comme le chef de file de la revendication en faveur d’une "eau publique". Durant les deux années écoulées, l’association avait multiplié les réunions publiques et les rendez-vous avec les élus, dans au moins cinquante communes du SEDIF. Après le 24 juin 2010, l’effort s’était encore amplifié en Seine-Saint-Denis, pour finir en sifflets le 30 novembre 2011, lors de la réunion du conseil communautaire avec des citoyens et militants, parqués derrière des barrières et seulement autorisés à brandir le portrait de Jean Jaurès. Tout cela en vain. Si l’eau est bien redevenue municipale dans la capitale, depuis le 1er janvier 2010, elle est restée dans son grand pourtour dans le giron des industriels.

Mais la leçon a été retenue. La Coordination Eau Île-de-France, qui figure aussi parmi les organisateurs du FAME 2012, le forum alternatif mondial de l’eau devant se tenir en mars 2012 à Marseille, concomitamment au forum "officiel", organisé par le Conseil Mondial de l’Eau, mise dorénavant sur la mobilisation citoyenne. Les 9 et 10 décembre, elle organise à Paris les Assises régionales des associations pour l’eau. Leur objectif premier est de structurer le mouvement associatif émergent pour construire une véritable force d’action et de propositions. Des séances préparatoires ont été organisées tout cet automne, dans le Val-de-Marne, la Seine-Saint-Denis, les Hauts-de-Seine, les Yvelines et le Val d’Oise pour préparer l’affaire. H2o a assisté à deux de ces rencontres, à l’Agora de Mantes-la-Jolie, le 19 novembre en présence des associations des Yvelines et du Val d’Oise, et à Montreuil, à l’espace Comme Vous Émois, le 26 novembre, cette fois en présence de diverses associations de Seine-Saint-Denis. Quelques élus avaient aussi réservé leur soirée.

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Le territoire du Syndicat des Eaux d'Île-de-France – document SEDIF


Un vent favorable
– Le recueil des factures et leur décorticage, la distribution de tracts dans les boîtes à lettres, l’organisation de conférences-débats, la projection de films, l’action sur les élus, sans compter, l’étude des rapports de délégation et des études d’audit, etc. ; "Tous les modes d’action peuvent devenir très forts si on les met ensemble ; les associations locales peuvent ainsi s’enrichir de leurs différents angles d’attaque et de leurs différentes pratiques, explique Jean-Claude Oliva,  président de la coordination, il faut à la fois faire nombre et développer notre capacité d’action et de propositions." Le défi est d’organiser et faire travailler ensemble une multitude d’acteurs : les associations d’usagers et de consommateurs, les associations de locataires, les associations environnementalistes, les groupements d’agriculteurs biologiques, etc. L’objectif est de créer une mobilisation citoyenne autour de l’eau, à l’échelle de la région, suffisamment forte pour se faire entendre des instances de décisions : le syndicat interdépartemental, l’agence de l’eau ou le conseil régional.

La période est propice : une large partie des schémas d’aménagement et de gestion des eaux  de  la région Île-de-France est en cours d’élaboration en même temps que le Conseil régional arrêtera en juin prochain sa nouvelle politique de l’eau 2013-2018. Par ailleurs, la courte présidence du Comité de bassin Seine-Normandie par Anne le Strat, adjointe au maire de Paris et initiatrice de la remunicipalisation de l’eau dans la capitale, en remplacement de André Santini, président du SEDIF, a été suffisante pour mettre en lumière des défaillances importantes dans la perception des taxes dues par les industriels. En dépit du fait que Monsieur Santini ait  retrouvé son siège par une décision du tribunal administratif de Cergy, rendue le 30 novembre dernier, les associations d’usagers peuvent dorénavant espérer une meilleure transparence. Le bassin est le plus grand en taille du territoire national puisqu’il s’étend sur 25 départements représentant 18 millions d'habitants et, pour l’agence, un budget annuel d'un milliard d'euros.


Mobiliser les citoyens – L’action citoyenne repose sur la capacité de mobilisation. Courgent, dans les Yvelines, ne compte que 390 habitants (393 exactement au recensement de 2006) mais son association de l’eau, ARPE-Courgent, créée en septembre 2011, compte déjà 60 adhérents, soit 15 % de la population, un record probablement ! Il est vrai que la municipalité a fait le choix de passer du statut de régie directe à celui de délégation de service public (auprès de Lyonnaise des Eaux) sans information aucune envers ses administrés, même pas dans le bulletin local paru trois jours après le conseil. La commune a une autre particularité : celle de posséder un énorme château d’eau, construit dans fin des années 1960, dans la perspective d’un lotissement, prévu sur la commune voisine, mais qui n’a jamais vu le jour. Surdimensionné, l’ouvrage est aujourd’hui en très mauvais état et laisse présager d’âpres affrontements, alors que l’association de l’eau s’est placée dans la "constellation" des Yvelines où une autre association – l’AREP-CAMY, est dorénavant solidement implantée (voir encart plus bas).

Dans le Val-de-Marne, la mobilisation des élus pour un retour en régie directe a été très importante, mais elle n’a cependant pas suffi pour l’emporter ; il lui a manqué le soutien plus massif des citoyens. "Les élus ont besoin de l’appui des citoyens pour voter le retour en régie directe", explique une élue du Val-de-Marne. Par dépit bien souvent, les élus laissent faire les choses, parfois même en entretenant soigneusement un double langage : un premier, très engagé pour le service public, à l’égard des citoyens et des associations, un second passablement poltron au sein des conseils communautaires.

La mobilisation citoyenne casse la connivence qui, au fil des décennies, s’était installée entre les industriels délégataires de service et les élus (de droite comme de gauche). C’est bien elle qui a initié le retour en régie directe d’un certains nombre de communes et agglomérations, principalement de gauche, mais aussi de droite (à l’instar de Castres dès 2003 et récemment de Saint-Malo en février 2011). Cette mobilisation doit cependant reposer sur l’expertise de quelques-uns, pas toujours aisée à acquérir. La réforme des collectivités territoriales, en cours et qui va augmenter les périmètres des établissements public de coopération intercommunale, va se traduire par un renforcement des régies intéressées, dans l’eau et l’assainissement comme dans les déchets, le chauffage urbain ou les transports. Cette évolution appelle une vigilance accrue des citoyens.


Le rôle des commissions consultatives des services publics locaux – Certaines associations suggèrent que ces commissions consultatives soient transformées en "commissions citoyennes", non discrétionnaires et dont les avis s’imposeraient légalement aux communes et communautés d’agglomération. L’échelon des communautés d’agglomération semblent en tout cas poser problème à la démocratie, ceci sans même relevé le bilan financier accablant, dénoncé par la Cour des comptes en 2009. C’est un échelon où règne l’opacité et où la responsabilité directe d’élu a disparu ; pire, les maires ont eux-mêmes pris l’habitude de se défausser de leurs responsabilités propres sur "l’agglo".

Pourtant, un arrêt du Conseil d’État, l’arrêt Commune d’Olivet rendu le 8 avril 2009, est venu renforcer significativement le pouvoir de négociation des communes et des syndicats. En vertu de cette jurisprudence, les directeurs départementaux des finances publiques doivent se prononcer sur toutes les délégations de service public, conclues avant l’entrée en vigueur de la loi Barnier du 2 février 1995, et supérieures à vingt ans dans les domaines de l’eau, de l’assainissement, des ordures ménagères et autres déchets, la date butoir d’exécution de ces contrats étant de facto fixée au 3 février 2015. Selon Ali Mohammad, adjoint au maire des Mureaux en charge de l’économie, du commerce, de l’emploi et de la formation et expert en matière de DSP, même si la méthodologie et les indicateurs financiers qui permettraient de mesurer clairement la rentabilité des contrats font défaut, cet arrêt constitue un instrument particulièrement fort au service des collectivités. Son principal avantage est de leur permettre de renégocier leurs contrats avec les entreprises délégataires en faveur d’une baisse des tarifs ou d’une augmentation des investissements. En période électorale, c’est un argument qui porte.

Les élections législatives, qui suivront en juin l’élection présidentielle de 2012, et plus encore les élections municipales de mars 2014 devront être le cadre d’un débat renouvelé sur la démocratie et la participation de la société civile aux affaires de la cité. Nombre d’associations y porteront le débat sur les services publics. Dans le domaine de l’eau en tout cas, la chose est sûre, beaucoup de maires auront la surprise de voir… qu’il y a du remous dans le bocal. .

 

 ResSources

Assises régionales de l’eau – IDF

Sur le Conseil communautaire d’Est-Ensemble du 30 novembre 2011 :
Bataille de l'eau à Est-Ensemble – l'article de Politis

Eaux troubles Est-Ensemble-Veolia – le documentaire de GreenPoppy Production

 

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AREP-CAMY vs Veolia
Rétrospective sur la bataille engagée à Mantes dans les Yvelines

L’Association pour le retour de l’eau en régie publique dans la communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines – AREP-CAMY, a été créée le 15 juillet 2009, à l’initiative de Maurice Martin, professeur retraité. Autour de lui, trois autres personnes, tout juste de quoi constituer légalement un bureau. Qu’à cela ne tienne : l’association pose sur la table de la collectivité le débat sur l’eau ; son objectif : faire revenir la Communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines (CAMY) à une régie publique de l’eau. Regroupant alors 12 communes, la CAMY a hérité de situations diverses en fonction de l’historique de chaque commune : si toutes étaient en délégation de service public, deux secteurs subsistaient : Guerville et Mantes-la-Ville, en délégation avec Lyonnaise des Eaux (alors filiale de GDF Suez) et Drocourt en délégation avec la SFDE tandis que les neuf autres étaient en délégation avec Veolia. Une majorité de contrats d’assainissement arrivait d’ailleurs à terme, alors que l’agglomération attendait la livraison d’un important investissement ayant concerné la construction d’une nouvelle station d’épuration à Rosny, pour un montant global de 45 millions d’euros.

Une année pour créer le débat – L’Association pour le retour de l’eau en régie publique (AREP-CAMY) arrivait donc à point nommé pour faire du remous. Un premier meeting, organisé le 29 mai 2009, avait précédé sa création ; à la tribune figuraient, autour de Maurice Martin, Marc Jammet, conseiller municipal du Parti Communiste, Djamel Nedjar, adjoint au maire le Limay et président du Syndicat mixte d’assainissement de la rive droite (Limay, Fontenay-Saint-Père et Guitrancourt) Jean-Luc Touly, président de l’Association pour le contrat mondial de l’eau (ACME) et membre du conseil scientifique d’ATTAC et Marie-José Kotlicki, auteur du rapport du Conseil économique et social sur les activités économiques dans le monde liées à l’eau. Un cinquième invité, David Querret, était venu présenter un "cas pratique", non des moindres : celui du retour en régie directe de la banlieue sud de l’agglomération de Rouen. 

Le 24 septembre 2010, l’AREP-CAMY organisait une soirée ciné-débat autour du film Water makes money. 13 000 tracts d’invitation avaient été distribués à travers toute l’agglomération. Seulement 80 personnes assistaient à la soirée, de nombreux syndicalistes étant sans doute à  Paris, où venait de s’achever une manifestation sur les retraites. La soirée fut tout de même particulièrement animée, un  petit groupe de cadres de Veolia et de Suez étant venu perturber la discussion. Cette initiative impromptue a du coup donné l’idée  à l’association d’éditer un tract en direction des personnels des entreprises délégataires leur assurant que leurs intérêts de salariés étaient tout à fait conciliables avec ceux des citoyens.

Trop sûrs d’euxLa mobilisation était devenue suffisante pour inciter la CAMY à commander un "audit" auprès du cabinet spécialisé SP 2000, pour "étudier toutes les possibilités" à l'échéance des contrats. Si SP 2000 dépend de l’Association des maires de France (AMF) et de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), le débat était néanmoins officialisé.

Le document de l’audit était remis en novembre 2010. 114 pages facturées à l’agglomération 53 000 euros et qui concluaient que la reprise de l’intégralité du service en régie se solderait pour l’agglomération par un surcoût de 4,3 à 6,5 millions d’euros. À l’issue des vacances de fin d’année, l’association présentait sa contre-offensive : un mémorandum de six pages relevant "de A à Z" toutes les carences et les insuffisances de l’audit. Le mémorandum était évidemment  adressé aux élus ainsi qu’au trésorier payeur général des Yvelines, en vertu de la jurisprudence Commune d’Olivet, habilité à se prononcer sur le contrat de délégation.

Tout est pareil sauf le prix – L’alerte faite au TPG, et par ses soins transmise au sous-préfet ainsi qu’au président de l’agglomération, allait marquer le pas. "Eau publique contre eau privée" titrait le journal local Le Courrier de Mantes en expliquant pourquoi les habitants de Follainville-Dennemont payaient 3,57 euros le mètre cube d’une eau issue des mêmes captages, transportée par les mêmes tuyaux que l’eau desservie dans la commune limitrophe de Limay à 2,71 euros. Trop beau, le cas d’école était repris par l’association de consommateur UFC-Que Choisir, apte à élargir l’audience…

Le 19 mai 2011, le Journal de la Camy annonçait aux 24 000 foyers de l’agglomération la  baisse du prix de l’eau, "fruit d’une longue négociation" entre la communauté d’agglomération et Veolia, le délégataire : moins 30 % et même de moins 55 % pour les 49 premiers mètres cubes, représentant une économie de 110 euros par an pour 120 m3. L’abonnement passait lui-même de 66 à 18 euros. 10 000 euros étaient provisionnés pour les impayés des familles en difficulté. En prime, s’ajoutait une assurance gratuite en cas de fuites. Le changement des branchements au plomb, déjà provisionnés par le délégataire à hauteur de 3,5 millions d’euros, était engagé. Enfin, l’agglomération reprenait le contrôle des effectifs et des "frais de siège". Les dispositions devaient entrer en vigueur le 1er juillet 2011 pour les neuf communes de l’agglomération desservies par Veolia.

Contreparties – En échange de ces concessions, Veolia a obtenu la prorogation de son contrat jusqu’en 2018 ; la baisse des tarifs ayant rendu les contrats plus avantageux pour les consommateurs, ces contrats ne sont plus soumis à l’obligation de réexamen par le TPG. Mais une nouvelle perspective s’ouvrir en même temps à l’industriel : celle de voir son aire s’action s’élargir considérablement. Sous contrainte de la réforme territoriale, de 12 communes, l’agglomération est effectivement passée à 17 au 1er janvier 2011 ; et ces 17 communes seront rejointes par 5 nouvelles dès 2012 et encore 13 autres d’ici fin 2013, pour totaliser 35 communes, soit environ 110 000 habitants. L’AREP-CAMY a donc entrepris une nouvelle bataille : convaincre les nouvelles communes (certaines sont toujours en régie publique) "d’échapper" à Veolia au moins jusqu’à l’échéance de leur contrat (ce qui est légalement possible).

Le combat se poursuit donc, avec encore plus d’acharnement et un seul objectif : le retour à la régie publique pour tous.

Mantes Eau Publique

 

AGLEAU vs Veolia
Rétrospective sur la bataille engagée à Cergy-Pontoise dans le Val d’Oise

Créée en 2004, la Communauté d’agglomération de Cergy-Pontoise –
CAPC, regroupe 12 communes, dont l’eau était auparavant gérée par des
entités différentes (syndicats et communes), au total neuf contrats de
gestion déléguée arrivant à échéance le 31 décembre 2008. En 2006, les
élus de la CAPC décidaient de déléguer le nouveau service de l’eau au
secteur privé en un contrat unique et harmonisé. Le 12 février 2008, le
conseil communautaire (majoritairement de gauche) retenait (à
l’unanimité) l’offre de l’entreprise SFDE, filiale de Veolia Eau, pour
un contrat unique de délégation, confié à une société dédiée CYO, pour
une durée de 18 ans à compter du 1er janvier 2009.

Le traitement des eaux usées est lui resté délégué à Cergy Pontoise
Assainissement, aussi filiale de Veolia Environnement, en vertu d’un
contrat d’exploitation de l’usine de Neuville-sur-Oise, signé en 1992
pour une durée de 30 ans. Selon la loi Barnier et la jurisprudence
Commune d'Olivet, le contrat prendra fin par anticipation, en février 2015.

En chiffres, la communauté représente 33 500 abonnés pour une
population de 195 000 habitants, et 10,6 millions de m3 d’eau consommés
par an, soit environ 30 000 m3 par jour, distribués par 630 kilomètres
de canalisations. 11 forages constituent les ressources propres de
l’agglomération, représentant 30 % de ses besoins. Le solde est acheté
au Syndicat des Eaux d’Île-de-France (SEDIF). 19 réservoirs et châteaux
d’eau assurent une capacité de stockage de  23 000 m3.

La communauté d’agglomération a pu s’enorgueillir d’un contrat de
délégation pour l’eau potable avantageux, avec un tarif unique du mètre
cube en baisse moyenne de 13,41 % pour 120 m3 par an, la baisse pouvant
s’élever jusqu’à 33,86 % à Éragny. Le délégataire s'engage par ailleurs à
réaliser un vaste programme investissements neufs à hauteur de plus de
17 millions d’euros sur cinq ans, en sus de 30 millions d’euros prévus
pour les travaux d’entretien et de renouvellement. La CACP reçoit une
redevance annuelle d’occupation des sols d’environ 150 000 euros plus
une dotation de 110 000 euros pour financer le contrôle de l’exécution
du contrat. Le contrat prévoit par ailleurs la gratuité pour
l’encaissement des redevances de la communauté pour l’eau et
l’assainissement.

Le profit se cache parfois dans les détails – Ayant
effectué un suivi minutieux de l’évolution des factures, AGLEAU dénonce
la réalité confuse du contrat avec le délégataire CYO. Elle dénonce par
ailleurs un mécanisme de révision des coûts ne répercutant
qu’imparfaitement les gains de productivité. La baisse moyenne alléguée
du prix du mètre cube (de 13,41 %) serait ainsi en réalité compensée par
l’instauration d’un abonnement progressif, instauré sous couvert
d’encourager les économies d’eau. La hausse du prix du mètre cube pour
les abonnés consommant plus de 150 m3 par an s’établit effectivement à
50 % par tranche de 30 m3. Toute une série de jeux d’écriture
(facturation différée, baisse de la redevance décalée) ou d’oublis purs
et simples (comme la non prise en compte de la redevance "préservation
de la ressource" dans le calcul de la baisse de la part eau) compliquent
l’examen. Au final néanmoins, rappelle l’association, en 2011, alors
que la consommation d’eau aura probablement baissé de 4 %, le prix au
mètre cube aura augmenté de 5,7 % ; ce qui est donc loin des "avantages"
promis à la signature du contrat. Dans le détail, explique
l’association, le prix du mètre cube d’eau TTC, à Cergy-Pontoise, pour
une consommation de 120 m3, est passé de 3,38 euros fin 2009 à 3,53
euros fin 2010 et 3,73 euros fin 2011 ; ce qui représente 10,3 %
d’augmentation sur deux ans, et 5,6 % sur 2011. Cette hausse de 5,6 %,
précise l’association, recouvre une majoration de 9 % de la part
privatisée du service et de 2,3 % de sa part publique.

Le profit s’affiche parfois en gras – S’agissant de
l’assainissement, un programme de rénovation et d’extension de la
station d’épuration de Neuville-sur-Oise, exploitée par CPA-Veolia, a
été décidé en 2008, sur injonction de la Commission européenne, pour un
coût global de 70 millions d’euros, dont 45 millions seront financés par
des subventions et le solde, 24,5 millions d’euros, par une
augmentation de la redevance à hauteur de 25 centimes d’euro au mètre
cube. Sans doute par "anticipation", le prix du traitement des eaux
usées a ainsi entamé depuis trois ans une progression vertigineuse : 23 %
en 2009, 13 % en 2010 et 15,9 % en 2011. Ces fortes majorations sont
sensées financer le projet de transformation de l’usine, mais les
informations données par les élus responsables sur le coût définitif du
programme et le montant des ressources supplémentaires ainsi acquises
restent vagues. Au total, calculées sur toute la période
d’amortissement, ces augmentations devraient rapporter au délégataire
une recette de 95 à 100 millions d’euros, estime l’AGLEAU, bien plus que
les 24,5 millions initialement prévus.

Créée en janvier 2010, l’AGLEAU – littéralement Alerte Générale sur
l’EAU, a obtenu en juillet 2011, une première reconnaissance de son
travail de suivi en accédant à la commission consultative des services
publics locaux de la CACP. Son objectif est  de dénoncer chaque fois que
possible comment le contrat eau potable signé en 2009 avantage
démesurément le délégataire. Un long pèlerinage puisque le contrat court
jusqu’en 2027. S’agissant de l’assainissement en revanche, l’horizon
est plus proche, puisque l’association a objectivement une chance de
fêter le retour en régie directe dès 2015. 

AGLEAU

UFC-Que Choisir de la région mantaise a entrepris une vaste enquête sur le prix de l’eau dans la région. L’association invite les abonnés à lui faire parvenir leurs factures. Une première enquête de ce type est déjà disponible pour le Val-de-Seine – email UFC-Que Choisir Val-de-Seine

UFC-Que Choisir Mantoisemail

 

Eau Val-de-Seine vs Lyonnaise des Eaux
Les prémisses d’une nouvelle bataille à Poissy dans le Val-de-Seine

L’association Eau Val-de-Seine – EVDS, a été créée le 8 juin 2011, avec pour objectif un retour en régie publique de la gestion de l’eau à Poissy en mars 2015. Poissy compte 35 860 habitants et près de 4 800 abonnés au service de
distribution d’eau, représentant une consommation annuelle de 2,25
millions de mètres cubes (chiffres de 2009). Le passage en régie publique mettrait fin au traité du 28 février 1941 approuvé par le préfet de Seine-et-Oise, et prorogé par contrats de concession successifs dont le dernier a été signé le 29 mars 1985 pour une durée de 30 ans, au profit du même délégataire : Lyonnaise des Eaux, filiale de Suez Environnement.

Avant même la création de l'association, ses initiateurs avaient organisé le 17 novembre 2010, en partenariat avec l’association Vivre sa Ville, une soirée de sensibilisation de l’opinion sur la question de l'eau autour du film Water makes money. Une centaine de personnes avaient assisté à la projection, évidemment suivie d’un débat. Plusieurs articles avaient relaté la rencontre dans la presse locale, ainsi que dans le journal de Vivre sa ville.

Eau Val-de-Seine compte d’ores et déjà une cinquantaine de membres dont une vingtaine d’actifs, tous progressivement en train de se former aux aspects techniques de la gestion de l'eau. L'objectif de cette formation "permanente et militante" est de tendre vers l'expertise de ses membres. Un premier tract d’information a aussi été rédigé, qui est aujourd’hui distribué auprès de la population. Parallèlement, l’association a entrepris de recueillir les factures d’eau des abonnés – toutes les factures aussi anciennes que possible, ceci afin d’établir, d’une part, un historique de l’évolution du prix de l’eau dans la collectivité et, d’autre part, une base d’analyse fiable de la facturation effective du service sur la communauté d’agglomération du Val-de-Seine. Les premiers recueils témoignent déjà d’une différence du prix du mètre cube d'eau de un euro entre Saint-Germain-en-Laye et  Carrières-sous-Poissy ; ce qui représente une différence de 120 euros par an sur la base d'une consommation moyenne annuelle de 120 m3 ; les deux villes sont pourtant desservies par le même délégataire.

L'étude du rapport fourni par le délégataire, Lyonnaise des Eaux, fait apparaître une augmentation du prix de 33 % à Poissy en dix ans. Mais le réseau semble aussi avoir été très mal entretenu puisqu'il est fait état de fuites à hauteur de 12 m3/km/jour. L'association dénonce par ailleurs le manque de transparence du délégataire dans sa gestion, notamment lorsqu'il s'agit de clarifier les montants prélevés au titre de l'entretien des canalisations ou encore des dépenses d'entretien et de renouvellement du réseau. Le problème est de taille puisque chaque année, en France, 6 milliards de mètres cubes d'eau fuient des canalisations, soit 25 % de la consommation d'eau nationale ; ces fuites participent d'une manière ou d'une autre au renchérissement des factures.  
 
Quid de l’assainissement ? L’affaire est, à Poissy, en régie directe. Cela va permettre à Eau Val-de-Seine de concentrer tous ses efforts sur le service d’eau potable.

Alors que plus de 8 millions de Français  vivent en dessous du seuil de pauvreté, soit 954 euros par mois, et que l’accès au logement, à l’électricité, au transport et la santé devient pour eux de plus en plus problématique, le combat sur le prix de l’eau acquiert une valeur symbolique, tant au niveau local que national.

Eau Val-de-Seine

 

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9-10 décembre 2011 – Pavillon de l’Eau à Paris
ASSISES RÉGIONALES DES ASSOCIATIONS POUR L’EAU

Le temps des victoires – À l’encontre de la tendance générale à la
libéralisation économique du monde, hier pour assurer la compétitivité,
demain pour éponger la dette, l'eau joue à contre-courant : le service
public regagne du terrain un peu partout, en France et ailleurs, dans le
monde.

Ce sont ces victoires ainsi que leurs acteurs que célèbrerons, le 9
décembre à Paris, les Assises régionales des associations pour l'eau
avec une cérémonie de remise des victoires du bien commun. Sept
victoires seront remises par des personnalités emblématiques des combats
pour l'eau dans notre région et au plan national, en n présence
d'Hélène Gassin, vice-présidente de la région Île-de-France, en charge
de l'environnement, l'agriculture et l'énergie, d'Anne Le Strat,
présidente de l'AESN et d'Eau de Paris, maire adjointe de Paris et des
multiples associations ayant participé au processus d’élaboration de ces
assises.

La journée du samedi sera réservée aux ateliers devant plancher sur les propositions d’actions.

Assises régionales de l’eau – IDF