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Les acteurs français sont toujours en attente d'une loi sur la solidarité internationale

Aujourd’hui, les collectivités et syndicats français ayant décidé de réserver une partie du budget eau et assainissement à la coopération décentralisée sont hors-la-loi. Cette absence de base juridique a d’ailleurs conduit l’État français à suspendre en 2003 les programmes des agences de l’eau. Un comble alors que tous les responsables (organismes internationaux, ONG et autres) sont en train de tirer la sonnette d’alarme sur le risque de pénurie d’eau qui pèse à très court terme sur la planète.

A l’initiative de Jacques Oudin, le Sénat français a adopté le 22 juin dernier à l’unanimité une proposition de loi visant à autoriser les collectivités et maîtres d’ouvrages à affecter 1 % de leur budget eau et assainissement au soutien d’actions de coopération. Cette proposition, qui constitue une opportunité unique tant pour les partenaires du Sud que pour les partenaires associatifs, n’a pas encore été inscrite à l’ordre du jour de la commission des lois de l’Assemblée nationale. Simple défaillance de la mécanique parlementaire.

Pour une fois qu’une fois qu’une proposition fait l’unanimité, la situation frise le ridicule…

Baptisée la loi "centime par m3", l’initiative a mobilisé le programme Solidarité Eau – pS-Eau – qui fêtait en novembre son 20ème anniversaire. Ci-joint, les éléments transmis à cette occasion à la presse.

Les défis mondiaux liés à l’eau ne cessent de se renforcer

Le 21ème siècle sera marqué par un double défi, sur la ressource en eau et sur l’accès à l’eau. La tension sur la ressource ne cesse de s’accroître : il faut aujourd’hui desservir 10 fois plus de consommateurs qu’il y a deux siècles, alors que 90 % des rejets domestiques ne sont pas traités et contaminent les ressources disponibles. D’ici 2025, la consommation domestique croîtra d’environ 40 % et la consommation pour l’irrigation (qui représente 70 % des prélèvements totaux) de 17 %. Cette situation est particulièrement préoccupante dans les pays du pourtour méditerranéen et sur l’ensemble du continent africain, dont la population a triplé en 50 ans et devrait doubler d’ici 45 ans.

Le manque d’accès à l’eau et à l’assainissement est la première cause de mortalité dans le monde. On estime à 1,1 milliard le nombre de personnes privées d’un accès convenable à l’eau potable et à 2,6 milliards celles ne disposant pas d’assainissement.

Face à ces enjeux, la communauté internationale s’est donnée comme objectifs de réduire de moitié d’ici 2015 la proportion de la population qui, dans le monde, n’a pas un accès durable à l’eau (cible particulière de l’Objectif du Millénaire pour le Développement – OMD – n° 7, Assemblée générale des Nations unies, New York, septembre 2000) et à l’assainissement (Sommet mondial du développement durable – SMDD – Johannesburg, septembre 2002).

Ce double défi est considérable : la croissance démographique implique de desservir, d’ici 2015, 1,6 milliard de personnes en eau potable et 2,2 milliards en assainissement (dont respectivement 400 et 410 millions de personnes en Afrique). Atteindre cette cible représenterait 735 milliards de US dollars d’investissements (49 milliards par an), soit plus de 10 fois le montant de l’aide publique au développement consacrée au secteur de 1996 à 2000.


Source : Joint Monitoring Programm

 
Populations à desservir
(en millions de personnes)
Alimentation en eau potable Assainissement
rural urbain total rural urbain total
Monde 580 1 020 1 600 1 100 1 100 2 200
dont Afrique 190 210 400 200 210 41

Le défi à relever est plus que financier : les autorités des pays en développement ne font pas encore de l’eau et de l’assainissement une priorité : l’eau et l’assainissement représentent moins de 1 % des budgets e Afrique et moins de 3 % en Amérique latine et aux Caraïbes. Par ailleurs, les autorités locales des pays en développement ne sont généralement pas les bénéficiaires ni les gestionnaires directs des fonds ; le suivi et l’entretien des installations dont elles ne sont pas maîtres peuvent s’en trouver compromis.

En attendant, à quelques mois de l’évaluation à mi-parcours de l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) par les 101 chefs d’Etats signataires du plan d’action de Johannesburg, les dernières publications de l’OCDE sont implacables : l’aide officielle dédiée à l’eau, après avoir atteint un pic de 2,7 milliards de US dollars en 1997, n’a cessé de chuter depuis, pour ne plus représenter que 1,4 milliard de dollars en 2002, entraînant dans sa chute les investissements privés.

La France a annoncé doubler son aide...

En référence aux OMD, la France a annoncé le doublement de son aide dans le secteur de l’eau, particulièrement en Afrique. L’effort à faire est considérable : il suppose une inversion de la tendance actuelle par rapport à la décennie 1990-2000. Les moyens mis en œuvre par l’aide bilatérale française dans le secteur de l’eau sur la période 2001-2002 sont importants : 268 millions d’euros par an consacrés à l’eau (dont 166 en Afrique) et 165 millions consacrés à l’eau potable et à l’assainissement (dont 108 en Afrique).

La contribution de la coopération décentralisée comptabilisée dans cette aide publique au développement bilatérale est de 18,1 millions d’euros sur le monde entier, dont 12,7 millions sur l’Afrique (ces montants ne comptabilisent pas les actions cofinancée par le Ministère des affaires étrangères ; un inventaire plus détaillé des crédits à la coopération non gouvernementale est d’ailleurs en cours). Contrairement au reste de l’ADP, la coopération décentralisée s’effectue aussi exclusivement sous forme de dons.

L’impact de l’ADP bilatérale française par référence à l’OMD n° 7 est cependant relativement modeste ; si elle permet à 1,32 million de personnes par an d’accéder à l’eau et l’assainissement, cela ne représente que 1 % des objectifs du millénaire. Le doublement de l’aide n’aura aussi d’effets que s’il s’accompagne d’une amélioration de la gouvernance.

... mais celle-ci n’aura d’effets qu’à l’appui de la coopération décentralisée

Les acteurs français de la coopération décentralisée et non gouvernementale disposent de compétences anciennes et reconnues, depuis la mobilisation de l’eau brute à la desserte des populations défavorisées. Leur action contribue à l’élaboration de politiques nationales de l’eau, la gestion intégrée des ressources, les multi-partenariats et l’implication des acteurs locaux.

Elle a aussi l’avantage de la souplesse et de la rapidité : les projets entrepris par exemple par l’Agence de l’eau Seine-Normandie sont généralement instruits en moins d’un an, engagés en 2 mois à partir de la décision d’octroi, et décaissés en 12 ou 18 mois en moyenne, contre 8 ans pour un projet bilatéral.

Cette souplesse de mise en œuvre mais aussi sa continuité et son approche spécifique mettent la coopération décentralisée au centre du concept "agir localement, penser globalement" dont le Conseil mondial de l’eau a fait sa devise. .

 

La "petite loi" Oudin adoptée par l'Assemblée nationale

27-01-2005 – L'Assemblée nationale vient d'adopter, en première
lecture, la loi "centime par m3", aussi baptisée "petite loi sur
l'eau", par référence à la "grande loi sur l'eau", attendue sous peu
[la Loi sur l’eau et les milieux aquatiques a été promulguée le 30
décembre 2006]. Initié par Jacques Oudin, le texte autorise les
collectivités et maîtres d’ouvrages à affecter 1 % de leur budget eau
et assainissement au soutien d’actions de coopération.
Le rapport présenté à l'Assemblée nationaleLe texte adopté