201408_aesn_qualite_itl.jpg

La qualité des rivières et des nappes sur le bassin de la Seine
OÙ EN SOMMES-NOUS ?

 

La question de la qualité des cours d'eau et des nappes doit être traitée avec pragmatisme, en se fixant des objectifs qui soient atteignables. Nous devons être pragmatiques sur les objectifs d’état écologique que nous retiendrons pour 2021 et ambitieux sur les actions que nous entreprendrons.

Michèle Rousseau
directrice générale de l'Agence de l'eau Seine-Normandie

Luc PEREIRA-RAMOSdélégué à la Planification et à la ProgrammationHeri ANDRIAMAHEFAchef de service Connaissances des milieux aquatiques
Agence de l’eau Seine Normandie – AESN


H2o – août 2014
photo  d'ouverture Michel Loup

Le bassin Seine-Normandie : définition et caractéristiques

Le bassin Seine-Normandie, plus exactement le bassin de la Seine et des fleuves côtiers normands correspond au territoire dont les eaux aboutissent soit à la Seine, soit aux petits fleuves côtiers normands. Sont donc comprises les régions Île-de-France, la plus grande part des deux Normandie, mais aussi le sud de la Picardie, une grande partie de Champagne-Ardenne, le nord de la Bourgogne et du Centre. Tous ces territoires partagent les mêmes eaux, et leurs habitants sont copropriétaires du même patrimoine de rivières, nappes phréatiques et littoral. Ce territoire est caractérisé par une relativement forte densité humaine, avec plus de 18 millions d’habitants pour un peu moins de 100 000 km2. Les débits des rivières et fleuves sont assez faibles, alors que le bassin accueille un quart des établissements industriels français, un cinquième de la production brute agricole, et les densités urbaines les plus fortes. Si rien n’était fait, les pollutions issues de ces activités se concentreraient dans les cours d’eau peu abondants du bassin, et se retrouveraient jusque dans l’estuaire de la Seine et en mer. Elles compromettraient la qualité des écosystèmes aquatiques et tous les usages de l'eau : approvisionnement en eau potable, conchyliculture, baignades, loisirs aquatiques, pêche, etc.).

Un état des lieux du bassin – Comme un locataire fait un état des lieux avant d’entrer dans ses murs, et un autre en sortant, il s’agit de faire un point complet de la situation du bassin : Quelle est en 2013, la qualité de l’eau qui coule dans les rivières ou qui se trouve dans les nappes ? Mais aussi, quel est l'état de santé des écosystèmes et de la biodiversité qui leur sont associés ? Et comment les uns et les autres ont-ils évolué depuis le précédent état des eaux établi en 2009 ?

201408_aesn_carte_1_vign.jpg 

L’évolution de la qualité chimique de l’eau des rivières

La qualité dite "chimique" des cours d’eau concerne les molécules que l’on retrouve dans les eaux qui y coulent. Comme ces composants sont très nombreux, la qualité est résumée par un indicateur unique, qui ne retient que le moins bon des paramètres de mesure : un seul paramètre non conforme suffit pour considérer qu’une eau n’est pas en "bon état" chimique, même si tous les autres sont bons. Selon cet indicateur, 25 % des eaux du bassin se sont améliorées entre 2007 et 2010, et l’on atteint une proportion de 31 % des portions de rivières en bon état. Mais ce résultat cache une amélioration spectaculaire, car un seul paramètre déclasse à lui tout seul un grand nombre de portions de cours d’eau, les hydrocarbures aromatiques polycycliques , HAP (il s’agit de résidus de combustion d’hydrocarbures. Pour l’essentiel, ces résidus proviennent de pollutions atmosphériques, via la retombée des fumées, ou du lessivage des routes qui entraîne les résidus de pneus. Les doses présentes sont infinitésimales, et il faudrait boire plusieurs millions de litres d’eau de rivière pour en absorber l’équivalent d’une grillade au barbecue. Mais il reste que leurs effets sur le milieu naturel sont mal connus, qu’ils sont entraînés dans le milieu et la mer, et qu’il est indispensable de les mesurer. Les gestionnaires de l'eau ont peu de prise sur cette pollution qui vient de sources multiples). Sans ces HAP, les rivières du bassin sont à 92 % en bon état chimique.

201408_aesn_carte_1_vign.jpg 


L’évolution de la qualité des écosystèmes présents dans l’eau

L’état écologique exprime en quelque sorte les conditions de vie dans les rivières, pour les organismes vivants. Entre 2007 et 2010, il a progressé de 15 points. Cet état écologique est mesuré sur des portions de cours d’eau (1 681 portions pour les rivières du bassin). Sur ces unités, 38 % sont aujourd’hui en bon état, contre 23 % en 2007.  Certaines portions du bassin s’améliorent, c’est le cas pour 29 % d’entre elles, alors que d’autres régressent, c’est le cas pour 11 % d’entre elles. D’un côté des efforts considérables sont faits pour dépolluer les eaux, mais de l’autre l’urbanisation continue, les réseaux vieillissent, l’occupation du sol se modifie, les habitudes de consommation intègrent des produits nouveaux et les pratiques de production s’intensifient.

Parmi les risques très présents en 2004, l'un a aujourd’hui fortement régressé : il s’agit de l’eutrophisation, qui survient lorsque les cours d’eau, les plans d’eau et les estuaires sont trop fortement enrichis (en azote et en phosphore) et que cet enrichissement excessif génère des proliférations de végétaux qui étouffent les écosystèmes. Tant dans les eaux douces que dans les estuaires, les proliférations ont diminué. Ainsi, sur 1 119 stations suivies en eau douce, 26 dépassent aujourd’hui les niveaux considérés comme problématiques en termes de prolifération végétale, et 23 présentent des problèmes d’oxygénation. Sur le littoral, de même, les épisodes de prolifération ("blooms") d’algues ont diminué.

201408_aesn_carte_3_vign.jpg 

La qualité des nappes souterraines

La qualité des nappes souterraines est-elle bonne ? NON, les nappes d’eau souterraines du bassin Seine-Normandie sont en grande majorité en état médiocre concernant la qualité chimique de leur eau. Sur 53 nappes, 39 sont restées en état médiocre entre 2007 et 2010, 2 ont perdu leur bonne qualité, mais 5 se sont améliorées et seules 7 sont restées en bon état. Cette situation est principalement due à deux causes, qui se superposent parfois : les produits phytosanitaires (ou "pesticides"), qui affectent 68 % des 53 masses d’eau ; puis les nitrates (30 % des 53 masses d’eau), pour l’essentiel liés à l’activité agricole.

201408_aesn_carte_4_vign.jpg 

Les rejets de pollution

Ces rejets de pollution ont-ils baissé ?

OUI pour la pollution "ordinaire", celle issue des matières organiques, des matières "en suspension" et du phosphore – Dans le cas des pollutions, les données comparables remontent à 2004. Les baisses de rejets de pollution "ordinaire" depuis 2004, sont de 30 % et 50 % pour les différentes formes de matière organique, qui agissent en particulier sur l’oxygénation des rivières. Il s’agit en quelque sorte de la pollution "biodégradable". La baisse résulte principalement de l’amélioration des systèmes d’assainissement : les réseaux d’égouts et les stations d’épuration fonctionnent mieux, en même temps que la capacité de traitement des pollutions a augmenté.

Les matières en suspension sont les particules qui restent présentes dans l’eau et réduisent notamment sa transparence, donc l’utilisation de la lumière par les écosystèmes. La situation est bonne, de ce point de vue, pour 85 % des points de mesure du bassin. Elle reste problématique pour les 15 % restants, en particulier lors des pluies, qui lessivent les sols urbains ou agricoles et qui ne sont pas suffisamment collectées et traitées avant d’être rejetées dans les cours d’eau.

Les rejets de phosphore issus des collectivités dans les rivières ont été réduits de 60 % depuis 2004, ce qui poursuit la baisse amorcée depuis plusieurs décennies. Cela est à mettre au compte de l’interdiction des phosphates dans les lessives d’une part et, d’autre part, de l’amélioration des systèmes d’assainissement, comme pour la matière organique. En revanche, le phosphore issu des pratiques agricoles se stocke dans les sols et continue, dans certaines zones, à ruisseler et à alimenter les eaux en phosphore, malgré la baisse du volume d’engrais phosphorés vendus sur le bassin.

OUI ET NON pour les microbes (bactéries et virus) – Ces questions concernent en premier lieu la baignade. Les résultats des classements des plages, établis selon des critères établis en 2006, montrent une très nette tendance à l’amélioration, même si le bilan est moins positif lors d’épisodes de pluie importants. Pour le classement des zones de production et de pêche à pied des coquillages (zones "conchylicoles"), une nouvelle méthode pour évaluer la qualité s’impose depuis 2010. Cette méthode est plus sévère qu’auparavant, et elle a conduit à un certain nombre de "déclassements" de secteurs. Malheureusement, de ce fait, il est impossible de se prononcer sur une tendance, ni sur un lien éventuel avec une dégradation de la qualité des eaux rejetées par les rivières sur le littoral.

OUI ET NON pour ce qui concerne l’azote et les nitrates – Les rejets en azote dit "réduit" sont majoritairement issus des eaux usées rejetées dans les rivières, et ils ont diminué de plus des deux tiers par rapport à l’état des lieux de 2004, passant de 53 000 à 17 000 tonnes par an. Les ventes d’engrais azotés restent stables depuis 2004. L'amélioration de la couverture des sols en hiver et les éventuels progrès réalisés dans la gestion des engrais par l’agriculture semblent effacés par l’augmentation des surfaces en grandes cultures à haut rendement et la diminution des surfaces en prairies.

C’EST DIFFICILE À DIRE pour les produits phytosanitaires ("pesticides") – Une nouvelle redevance, qui taxe les produits phytosanitaires, permet de disposer d’informations sur les quantités de produits vendus, mais seulement depuis 2008 ; il est donc impossible de se prononcer sur les évolutions dans ce domaine. Comme pour les engrais azotés, les progrès réalisés en termes de quantité épandue sur chaque parcelle semblent effacés par l’augmentation des surfaces de grandes cultures au détriment, notamment, des prairies. Cependant, les substances qui ont fait l’objet d’une interdiction sont de moins en moins présentes dans le milieu.

OUI pour les métaux – La quantité des métaux et polluants organiques persistants, de source atmosphérique, reste importante même si elle tend à diminuer depuis une décennie. Ces métaux sont soit contenus dans l’eau de pluie qui a traversé l’air ambiant, soit emportés par la pluie lorsqu’elle ruisselle sur un sol pollué. Le faible niveau actuel de contamination des rivières par les métaux témoigne des efforts de réduction des rejets ou de l’effet des interdictions d’usage.

Mais dans les sables et les vases, la contamination est plus importante. Elle est localisée en Île-de-France et au niveau de l’axe de la Seine et de l’Oise. Les sables et vases de l’estuaire et la baie de Seine sont particulièrement contaminés par les métaux (cuivre, cadmium, zinc et argent). Le mercure et le plomb sont présents sur l’ensemble de la façade maritime. On observe une augmentation du cuivre et une diminution progressive du zinc depuis 2004. À noter que, d’une manière générale, on observe une tendance à la baisse de l’ensemble des polluants historiques dans les estuaires et sur le littoral (PCB, métaux, lindane, etc.)

PAS VRAIMENT pour les autres substances chimiques – En premier lieu, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) restent présents dans les eaux du bassin. Leur réduction sera le fait d’un ensemble de politiques publiques et de comportements, qui concernent d’autres domaines que l’eau : l’utilisation des carburants, la composition des pneus, la gestion de l’eau de pluie en ville…

Les alkylphénols (composés organiques majoritairement utilisés pour fabrication des détergents, les agents moussants, additifs des carburants et des produits cosmétiques), du fait de leurs caractéristiques chimiques, se retrouvent peu dans les eaux. En revanche, ils sont mesurés en quantités relativement importantes dans les sables et vases, notamment le long de l’axe de la Seine et de l’Oise. Les polychlorobiphényles, ou PCB, sont des produits autrefois très utilisés dans les transformateurs électriques. Ils sont toxiques pour les organismes vivants. Les produire et les utiliser est interdit depuis 1987, mais on les retrouve encore dans les sables et vases, et même dans certains organismes vivants dans les écosystèmes aquatiques, notamment dans l’axe de la Seine et de l’Oise. Le risque qu’ils comportent s’atténuera petit à petit, lorsqu’une nouvelle couche de sables et vases non contaminés recouvrira l’ancienne.

La situation du bassin vis-à-vis de la réglementation sur l’état des eaux

La politique de l’eau est organisée par la Loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006, qui transpose, notamment, une directive-cadre européenne (directive 2000/60/CE établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau). La France s’est engagée, par ces textes, à atteindre un certain nombre d’objectifs pour la qualité des rivières, plans d’eau, littoraux et nappes de son territoire. Ces objectifs sont exprimés par référence à une échelle de qualité des milieux qui intègre l’ensemble des critères : le "bon état des eaux". Pour être en "bon état", une portion de rivière, de littoral ou une nappe doit respecter des normes sur l’ensemble des paramètres, et non pas une moyenne ou un état général. Ce système de classement est synthétique, comparable, mesurable, mais il est exigeant : même en progressant sur 99 % des critères, un secteur du territoire peut rester mal classé si la qualité n’est pas au rendez-vous pour un seul critère. L’échéance finale pour atteindre l’objectif est 2027, mais deux rendez-vous intermédiaires sont fixés : 2021 et, plus près de nous, 2015. Comment la situation, et la progression, décrites précédemment, vont-elles positionner le bassin par rapport à ces objectifs ?

En poursuivant les efforts et la progression actuels, 45 % des rivières ou portions de rivières du bassin devraient atteindre le seuil du bon état dès 2021. Cependant, l’objectif retenu par la France est de 90 % dès cette date. Pour respecter cette ambition, il faudrait donc doubler le nombre de points où le bon état serait atteint en 2021, par rapport à la tendance actuelle. 44 nappes sur 53 risquent de ne pas atteindre l’objectif en 2021. Les principaux problèmes pour atteindre cet objectif concernent les produits phytosanitaires et les nitrates, suivis par certains produits chimiques (« composés organiques halogénés volatils"). Pour le littoral, le risque d’écart à l’objectif en 2021 concerne 31 % des eaux côtières et 6 sur 7 des secteurs d’estuaires. Les pollutions le plus souvent incriminées sont les nitrates, qui favorisent les proliférations d’algues, et les contaminants par les polluants chimiques dits "persistants".

Pour les nappes comme pour les rivières, il faudrait consentir des efforts supplémentaires à ceux qui sont déjà programmés, pour atteindre les ambitions fixées. Comme le prévoient les textes, cependant, la possibilité de fournir ces efforts sera à apprécier selon leur coût et leur faisabilité technique, ainsi que de la capacité des milieux atteints à retrouver un état satisfaisant, compte tenu de leur temps de réponse aux changements.

Qui paie pour l’eau et la dépollution ?
Les ménages et les petites
entreprises paient 3,6 milliards d’euros pour leurs dépenses liées à
l’eau (facture d’eau et traitement des eaux usées). Une partie de leur
redevance, représentant 1 % de leurs dépenses totales, est utilisée pour
restaurer et protéger les rivières, plans d’eau, zones humides et
littoraux. Ils bénéficient de ces milieux en meilleur état, y compris
sur le plan économique, mais ces bénéfices sont en grande partie
impossibles à comptabiliser.
Les industries paient 1 milliard
d’euros par an pour le prélèvement d’eau et l’assainissement. Le système
redevances-aides de l’agence conduit à un transfert en leur faveur de
11 millions d’euros par an en moyenne. Cela représente 1 % de leurs
dépenses pour l’eau. Les efforts restant à produire pour traiter les
pollutions ponctuelles des grandes entreprises sont estimés à environ
260 millions d’euros par an.
L’agriculture paye au total 193
millions d’euros par an pour l’irrigation, l’abreuvement des troupeaux
et la gestion des effluents d’élevage, redevances comprises. Le système
redevances-aides de l’agence permet au total aux activités agricoles de
bénéficier de transferts en leur faveur. Cela représente 4 % de leurs
dépenses pour l’eau. L’agriculture bénéficie par ailleurs de subventions
publiques en provenance d’autres acteurs (l’État, les collectivités et
autres) dans le cadre de divers dispositifs.

{mospagebreak title=2. Méthodes d'évaluation et perspectives dans le cadre de la DCE&heading=1. La qualité de l'eau dans le bassin Seine-Normandie}

201408_aesn_qualite_itl.jpg

La qualité des rivières et des nappes sur le bassin de la Seine
MÉTHODES D'ÉVALUATION & PERSPECTIVES

photo  d'ouverture Michel Loup

 

L’évaluation de la qualité de l’eau


Comment évalue-t-on la qualité de l’eau ? Les stations de mesure sont des points physiques le long de la rivière où l’on prélève régulièrement selon un protocole bien déterminé de l’eau en vue de l’analyse de paramètres effectuée en laboratoires. Différents paramètres sont ainsi pris en compte et mesurés : la physico-chimie (température de l’eau, taux d’oxygène, matières organiques…) ; la chimie (les substances, pesticides, nitrates) ; la biologie (poisson, invertébrés, algues).

Pour les nappes, il existe également des points de mesures, déterminés en fonction des lieux, des profondeurs où l’on touchera des nappes d’eau différentes. Mais ici uniquement les paramètres chimiques sont mesurés.

201408_aesn_mesure.jpg 

 

Les analyses programmées sur ces stations permettent d’évaluer chaque année un état écologique et chimique.  Au sens de la directive cadre européenne sur l’eau (DCE), l’état d’une rivière ou d’une nappe est en effet calculé à partir d’un état écologique (biologie + physico-chimie) et d’un état chimique.

Depuis 1971, le nombre de stations de mesures pour les rivières est en nette augmentation puisque leur nombre est passé de 293 en 1971 à 1 100 en 2014. Les paramètres d’analyse sont aussi de plus en plus diversifiés : à titre d’illustration, pour les rivières, on mesurait 66 paramètres en 1971,  271 paramètres en 1992 et 895 en 2007. Cette augmentation résulte principalement de l’ajout des pesticides, des compléments sur les paramètres biologiques et les micropolluants organiques. En ajoutant progressivement de nouveaux paramètres à nos systèmes d’évaluation de la qualité de l’eau, cette évaluation devient mécaniquement de plus en plus sévère, même si la qualité s’améliore. C’est l’effet "thermomètre".

Zoom sur les pesticides – Sur les 41 substances dangereuses prises en compte pour évaluer l’état chimique des eaux des rivières selon la directive cadre européenne, 23 sont des pesticides. Un seul est actuellement autorisé en France : l’Isoproturon. Les autres ont été interdits à l’usage. Les 23 pesticides de l’état chimique pour les mesures directive cadre europénne sont : Alachlore, Aldrine, Atrazine, Chlorfenvinphos, Chlorpyrifos, DDT total, Dieldrine, Diuron, Endosulfan alpha, Endosulfan beta, Endosulfan famille, Endrine, Hexachlorobenzène, Hexachlorobutadiène, Hexachlorocyclohexane, Hexachlorocyclohexane beta, Hexachlorocyclohexane delta, Isodrine, Isoproturon, Lindane, para-DDT, Simazine, Trifluraline. Si l’on recherche ces pesticides dans les rivières, on n’en trouve qu’en faible concentration dans la mesure où ces molécules sont interdites depuis une vingtaine d’années. Cependant, on les retrouve parfois encore dans les nappes d’eau souterraine, du fait du temps qu’ils mettent à "traverser" le sous-sol.

D’un autre point de vue, si l’on regarde non plus seulement la liste des pesticides de la directive cadre européenne mais la totalité des pesticides, incluant les pesticides autorisés actuellement, les analyses de cours d’eau révèlent une présence de pesticides en grande quantité. Par exemple, l’Oxadiazon à lui seul "déclasse" 250 rivières du bassin Seine-Normandie (le déclassement est le fait de classer une rivière en mauvaise état chimique). La situation des rivières peut donc être "bonne" ou "mauvaise" suivant les pesticides regardés. Selon les critères de la directive cadre européenne, la plupart des rivières du bassin Seine-Normandie sont en bon état chimique pour les pesticides. Si l'on regarde l’intégralité des pesticides, la carte montre néanmoins que la plupart des rivières contiennent des concentrations de pesticides importantes.

Pour les nappes d’eau souterraines, tous les pesticides sont pris en compte. La concentration de pesticides est le principal paramètre déclassant les eaux souterraines. En effet, ils affectent 68 % des 53 masses d’eau souterraines du bassin.

Zoom sur les nitrates – Les chiffres de référence sur la teneur en nitrates [NO3] d’un cours d’eau sont respectivement de 8 à 10 mg/L à l’état naturel, 25 mg/L dans un contexte agricole et > 50mg/L  en situation de pollution. Cette échelle est celle retenue par la directive cadre européenne et, de ce point de vue, la majorité des rivières du bassin Seine-Normandie sont en bon état sur le paramètre nitrates, avec une concentration comprise entre 0 et 50 mg/L. Cependant, le seuil de nitrates à respecter pour stopper l’eutrophisation est de 18 mg/L, et de ce point de vue, la majorité des rivières du bassin présente des concentrations supérieures à 18 mg/L.
S’agissant des nappes d’eaux souterraines, le seuil de déclassement est de 50 mg/L. 53 % des nappes d’eau du bassin sont déclassées à ce titre.
S’agissant enfin des prélèvements pour un usage destiné à l’eau potable, selon le taux de nitrates de l’eau prélevé dans les nappes souterraines, la vigilance et la protection du captage sont accrues. Le seuil de vigilance est fixé à 25mg/L, celui d’action renforcée à 37 mg/L et celui d’autres actions 50 mg/L.

Les perspectives par rapport à la directive cadre européenne sur l’eau

La directive cadre sur l’eau fixe l’objectif ambitieux du bon état pour 2015. Si ces objectifs ne sont pas atteints, il faut expliquer pourquoi. Les raisons portent sur des critères économiques (cela coute trop cher), techniques (on ne sait pas faire), naturels (quoi que l’on fasse, cela n’aura pas d’impact sur le milieu).

Où se situe la France dans le panel européen ? Dans le cas du bon état écologique, 43 % des masses d’eau en "bon état" en 2009 et 33 % des masses d’eau "en dérogation" pour 2015. Sur le graphique qui suit, le gris représente les états "incertains" et la zone blanche "la distance qu’il reste à parcourir" jusqu’aux objectifs de 2015. Si la France se situe dans le milieu du tableau par rapport en termes d’état et d’objectifs, l’Allemagne en revanche propose des objectifs très peu ambitieux (20 % des masses d’eau en bon état). Pour elle, la marge de progrès en sera d’autant plus grande en 2021. Quant à l’Angleterre, elle vise 43 % d’objectifs et a déjà 35 % des masses d’eau en bon état.

201408_aesn_panel_europe_vign.jpg 

 

L’état écologique des rivières du bassin demain ?  Entre 2006 et 2010, l’état écologique des rivières a progressé de 15 %. Mais il reste encore 30 % à gagner d’ici 2015, et environ 25 % entre 2015 et 2021.
En résultat, si les tendances actuelles se poursuivent, 45 % des rivières ou portions de rivières du bassin Seine-Normandie devraient atteindre le bon état dès 2021 alors que l'objectif retenu par la France est de 90 % à cette date. La loi prévoit que les efforts fournis soient appréciés au regard de leur coût et de leur faisabilité technique. Comme l'explique Michèle Rousseau, directrice générale de l'Agence de l'eau Seine-Normandie, la question de la qualité des cours d'eau et des nappes doit être traitée avec pragmatisme, en se fixant des objectifs qui soient atteignables. Nous devons être pragmatiques sur les objectifs d’état écologique que nous retiendrons pour 2021 et ambitieux sur les actions que nous entreprendrons.  .

201408_aesn_perspectives_1_vign.jpg 

 

201408_aesn_perspectives_1_vign.jpg 

 

aesn.gif
ResSources
L'Agence de l'eau Seine-Normandie a publié le bilan 2010 de la surveillance de l'état des milieux aquatiques du bassin Seine-Normandie. Ce document présente l'état qualitatif des masses d'eaux souterraines, superficielles et littorales, évalué selon les principes posés par la directive cadre européenne sur l'eau pour l'année 2010.
pdf Bilan
2010 de la surveillance de l’état des eaux du bassin Seine-Normandie :
Résultats pour les eaux souterraines, cours d’eau, plans d’eau et eaux
littorales

L'Agence de l'eau Seine-Normandie a également publié en 2011 une plaquette d'information sur la surveillance et l'état des milieux aquatiques du bassin Seine-Normandie. Ce document présente l'état qualitatif des masses d'eaux souterraines, superficielles et littorales évalué selon les principes posés par la Directive Cadre Européenne sur l'eau. Cette plaquette est composée de 14 fiches thématiques.
pdf Surveillance et état des milieux aquatiques du bassin Seine-Normandie

Agence de l'eau Seine-Normandie – AESN